jeudi 30 octobre 2014

Coup de gueule : annulation de la Zombie Walk de Lille.

Depuis 2009, une marche étrange animait les rues de la capitale du Nord : des centaines, puis des milliers de gens grimés en mort-vivants déambulait paisiblement. 
Assez vite, d'autres villes ont imité ce mouvement sympathique, comme Bordeaux ou Paris.

Pour l'édition 2014, les organisateurs attendaient un nombre record de participant, promettant de doubler le score réalisé par Bordeaux (3000 zombies ! )



C'était sans compter sur une réaction négative de la mairie de Lille. 

Officiellement, la Zombie Walk de cette année est annulée pour des motifs purement sécuritaires : menaces terroristes avec renforcement du plan vigipirates, et attaques de Clowns. J'ai bien dit : officiellement !

L'adjoint au Maire de Lille chargé de l'occupation du domaine public, Jacques Richir, réfute déjà l'influence des Clowns ! Quant aux menaces terroristes, le plan Vigipirate est déjà enclenché depuis bien longtemps, il était déjà actif l'an passé quand 5000 zombies avaient obtenu le droit de défiler, ne générant ni heurt ni problème de sécurité.
 

Le vrai motif de ce refus est ailleurs. Jacques Richir l'admet lui-même : le défilé des zombies ne renvoie pas l'image que ce monsieur veut donner de la Ville. La mairie n'est pas désireuse de ce genre de manifestation.

On a donc affaire à un mensonge éhonté en guise de prétexte au refus d'une manifestation culturelle - car oui, mettez-le vous dans le crâne, M. Richir et Mme Aubry, les zombies sont aussi de la culture, culture Fantastique en l'occurrence - mais en plus, on affiche son mépris à la face des milliers de gens qui s'apprêtaient à passer une excellente journée, sympathique et distrayante.

attentif à tous ? Vraiment ?!

Si les zombies ramenaient de l'argent dans les caisses de la ville, le débat serait tout autre ! Mais là, ils se contentent de ne rien coûter à la commune. C'est notoirement insuffisant pour justifier de leur existence.
Faute de mieux et pris de court, les organisateurs de la Zombie Walk vont donc organiser un Zombie Village à la gare Saint Sauveur. On ne peut guère leur en vouloir quand on sait qu'ils avaient prévu une seconde date pour cette marche et que, bien sûr, ils ont obtenu un refus également. On préfère en effet qu'ils n'entachent pas de leur présence l'exposition Sesostris qui se tiendra au Grand Palais à ce moment-là (pourtant, le mélange zombie / momie aurait été très intéressant !)

On remerciera donc pour son ouverture d'esprit, son respect de TOUTES les formes de culture la très tolérante ville de Lille, qui encourage avec force les manifestations les plus insolites et les plus populaires ! Je ne m'étonne plus que la capitale des Flandres ne possède pas un salon comme Trolls et Légendes (Mons, Belgique), Les Utopiales (Nantes), Les Imaginales (Épinal) ou les Intergalactiques (Lyon). Je doute que l'équipe municipale considère la SFFF comme de la culture !

Si ceci n'est pas l'image que la municipalité veut donner de Lille...



Ceci n'est pas l'image que Lille mérite !




mardi 28 octobre 2014

"Pourquoi tu écris ?"

Le monde se divise en deux catégories. Ceux qui considèrent les auteurs comme des artistes, des érudits, des gens intelligents et somme toute très respectables et ceux qui les considèrent comme des glandeurs, des rêveurs, des éternels adolescents - ou des drogués.

Je vous laisse choisir votre camp ;)



Je dirais qu'il y a un peu de vrai dans les deux postulats. Les auteurs sont des artistes et des rêveurs. Sinon, comment voudriez-vous qu'on imagine les histoires qu'on vous propose de lire ? 
Quant au reste, je vais faire une grosse ellipse et le passer sous silence, faites-en ce que vous voulez chez vous.

Dans mon entourage professionnel, beaucoup de gens savent que j'écris. Très peu m'ont lu, car je ne diffuse ma prose qu'avec parcimonie sur mon lieu de travail. Mais mon activité en intrigue certains. Régulièrement, j'entends donc cette question : "Pourquoi tu écris ?"
Il est rare que j'entre dans les détails de tout ce que m'apporte l'écriture avec mes collègues. Certains d'entre eux, pourtant, me suivent dans mes aventures littéraires, ce qui représente une certaine fierté pour moi. Avec eux, et avec eux seulement, je peux entrer dans le détail.

Pour les autres, je me contente de dire que ça me plait. Il faut dire que, dans une question aussi simple, beaucoup de choses dépendent de l'intonation de l'interlocuteur. Je ne peux pas me permettre de dire tout ce que je pense sur mon lieu de travail :)

Mais si je le pouvais, voici à quoi ça ressemblerait :

- Pourquoi tu écris ? (t'as tellement de temps à perdre ispice di fignasse ?)


- Parce que j'adooore passer des heures à écrire une nouvelle, des dizaines d'heures pour écrire un premier jet de roman, et des centaines pour obtenir un roman que je puisse oser envoyer à un éditeur. Parce que ça s'appelle une passion, que ça prend aux tripes. Accessoirement, pendant que j'écris des histoires que tu ne liras jamais, je me sens bien, pas aigri comme toi, ispice di counard.

- Pourquoi tu écris ? (c'est un truc de camé et d'asocial, qu'est-ce qui te prend de faire un truc pareil ?)
 

- Parce qu'il y a toujours eu beaucoup de monde dans ma petite tête. Le fait d'écrire et de mettre tout ce monde sur le papier, ça fait de la place pour accueillir d'autres gens. Tu vois, je ne suis pas seul ! Je suis même sur un forum peuplé de plus de 1300 autres auteurs. Quant à la came, je suis addict à mon traitement de texte, je sniffe mon clavier à m'en exploser les narines, rhâââââ !!!

- Pourquoi tu écris ? (tu vas encore y laisser toute ton énergie et tu n'en auras plus pour le boulot - remarque qui pourrait venir de mon chef.)

- Tu sais bien que si je n'ai pas ma dose, je suis insupportable. Je vais encore écrire deux heures ce matin, peut-être deux de plus ce soir, j'aurais des valises noires sous les yeux, mais je serai docile comme un agneau, tu ne m'entendras pas râler de la journée et tu devrais même me remercier !

- Pourquoi tu écris ? (cette activité ne présente, à priori, aucun intérêt professionnel - message qui pourrait venir de mon système informatique).

- "ctrl" + "alt" + "suppr"  ^^


- Pourquoi tu écris ? (T'espères QUAND MEME PAS que tu seras édité un jour ? Surtout tes histoires de trucs bizarres, là, PERSONNE ne lit ça ? Les gens qui vivent de leurs plumes c'est que des gens qui connaissent des gens dans l'édition, tu devrais le savoir, quand même !)

- Parce que j'adore écrire des histoires invraisemblables mais réalistes, les partager avec des gens qui aiment les lire. Tout comme l'ont fait avant moi des gens comme King, Rowling ou Lovecraft, qui n'étaient rien ni personne avant de devenir des références mondiales de la SFFF. Tu devrais le savoir, quand même !

- Pourquoi tu écris ? (vous demandez-vous après lecture de cet article, sans aucune arrière pensée)
- Parce que j'ai essayé de faire beaucoup d'autres choses et qu'en fin de compte, j'en reviens toujours à l'écriture. C'est comme ça que j'exprime le mieux les innombrables idées qui courent dans ma tête. J'ai ça dans le sang, je pourrais passer mes journées à écrire sans m'arrêter si je ne craignais pas de tomber de fatigue. Je ne désespère pas qu'un jour, dans de nombreuses années, je puisse même en vivre. Je vous ai bien dit que j'étais rêveur ;)




vendredi 24 octobre 2014

Le premier jet : point A, point B, point final :)

Récemment, avec d'autres auteurs, on a beaucoup parlé des premiers jets de roman. Comment faire, quand se lancer, doit-on faire lire ses extraits par les autres afin d'obtenir des avis critiques pendant la rédaction... Beaucoup de questions et de hantises planent autour de ce moment crucial qu'est l'écriture d'un roman.

Chacun a sa méthode, ses trucs et astuces. Ce qui compte, finalement, c'est le résultat.

Dans cet esprit, je vais vous expliquer la mienne, ce qui fonctionne ou ne fonctionne pas quand je me met à écrire un roman.

Phase 1 : préparation.



Chez moi, c'est une étape très intériorisée. Je laisse gentiment mes idées se développer dans un coin de ma tête, je les ressasse un peu, en gros je fais bouillir la marmite. En général, mon idée de départ est une image fixe, ou une séquence très courte que je me représente comme un film qui aurait la durée d'une publicité. 
Si je voulais lui trouver une formulation, ça prendrait la forme d'une question, commençant par "et si..." 
Les semaines passent, puis les mois s'enchaînent, et ma question "et si..." trouve ses réponses. Les personnages se dessinent dans mon esprit, le film s'étire, l'idée se complète. À ce moment-là, je prends des notes. Rapidement, j'ébauche un plan du roman, où se dessinent les grandes phases.
C'est en général à ce moment-là que les failles deviennent visibles. Il me manque des éléments pour que le plan soit complet et que l'histoire puisse s'écrire, ce dont je n'aurais pas eu conscience sans plan. La réflexion se poursuit donc pendant le temps nécessaire à ce que les grandes lignes de l'histoire soient clairement tracées, que les axes narratifs apparaissent. 
Difficile de dire combien de temps il faut pour parvenir à ce plan complet, ça varie selon la complexité de l'histoire, mon inspiration, et le temps que je peux consacrer à y réfléchir. Mais pour vous donner un ordre d'idée, ça se compte en mois.

Phase 2 : écriture.



Maintenant que tout est prêt, je peux me lancer dans la rédaction. L'essentiel est de trouver un créneau de plusieurs semaines consécutives pendant lesquelles je vais écrire presque tous les jours. 
Le but de la manœuvre va être d'écrire en un minimum de temps le roman dont j'ai tracé le plan. Dès lors, mon PC devient le lieu d'une course. Il y a le point A, le premier mot du roman. Quelque part, plus loin, il y a le point B, qui est le mot "FIN" que j'apposerai au bas du roman. Entre les deux, il ne doit y avoir que mon clavier, mon écran et mes doigts.
Point A, pont B, point barre !
Quand je suis lancé, à moins d'un gros coup de fatigue - écrire un roman, ça épuise ! - je ne m'arrête pas. Mon premier jet n'est pas le meilleur que j'ai pu lire, mais il est authentique, chargé de toute l'énergie que je peux y mettre. Il est frais, riche des idées que j'ai notées et complétées. Mais il a des failles. Je pense que tout premier jet contient des failles.
Si je m'y arrête, alors que mon esprit n'a envie que d'écrire la suite, je vais perdre le fil et la magie va se rompre. 
Point A, point B, point barre !
Rappelez-vous que cette méthode fonctionne pour moi, mais pas pour tout le monde. La difficulté consiste à oublier les doutes, à cesser de réfléchir à la structure du roman. À faire une confiance aveugle à Mme Muse. 

Avantages de la méthode :



Ce système a quelques aspects positifs que j'adore :

1- je n'écris pas mon roman, je le vis. 
Lorsque j'écrivais la fin d'Essence d'Asphalte, en plein mois d'août, je me suis attaqué à une scène qui se déroule en Février. Je me suis tellement immergé dedans que, quand ma séance d'écriture s'est achevée, j'ai pensé qu'il fallait que je me couvre parce qu'il allait neiger de hors. La réalité du récit et celle du monde réel s'étaient simplement confondues. Croyez-moi, ce genre de moment est un pur délice, une expérience unique mais qu'on peut reproduire. La seule condition, c'est de cesser de réfléchir à autre chose qu'aux phrases qu'on écrit, se laisser porter par l'inspiration. Essayez, vous verrez ;)



2- mon premier jet est très vite achevé.
Pour Essence d'Asphalte est ses 320K SEC, il m'a fallu sept semaines. Mais en réalité, seulement cinq. Parce que j'ai eu un monstrueux coup de fatigue à la mi-juillet, et que je me suis pris deux semaines de vacances pendant lesquelles je n'ai pas touché mon clavier. Pour un précédent roman, que j'ai écrit entre 2010 et 2011, il m'avait fallu un peu moins de quatre mois pour aligner 897.000 SEC. N'y voyez pas une simple volonté d'aller vite pour aller vite, même si la vitesse a toujours un côté grisant. Je vais vite pour que l'inspiration n'ait pas le temps de se dissiper, que les idées restent aussi pures que possible.


3- Le premier jet n'est pas si mauvais.
On pourrait croire qu'une frappe au kilomètre produit des premiers jets un peu ratés, mal foutus, qui ne tiennent pas vraiment la route. J'étais même le premier à penser ça. La relecture d'Essence d'Asphalte me donne tort. Même après une première relecture à chaud, il reste encore beaucoup de travail sur ce roman. Mais il fonctionne, il accroche bien. L'essentiel est là. Il a le goût brut et fort des choses qu'on a fait avec passion. Comme un camembert moulé à la louche - à ne pas laisser traîner au frigo, par peur que son odeur se répande sur les autres aliments !


Il ne reste plus qu'à l'affiner, en garder le bon et le très bon, en retravailler le moyen et en retirer le mauvais. C'est le moment de se poser des questions. C'est le moment d'exprimer ses doutes, de les analyser, et de solliciter l'aide des bêta-lecteurs. 
J'en suis arrivé à ce moment-là. Je suis bien content d'avoir laissé mes doutes au vestiaire, car tous n'étaient pas justifiés.

Je finirai cet article par un aveu : j'ai hâte d'entamer mon prochain roman. Il commence à être bien mur, les personnages remuent dans ma tête. Si tout va bien, je pourrai l'écrire à partir de Février :)



mercredi 22 octobre 2014

Convention Cocyclics 2014

Ce n'est pas tous les jours qu'on a l'occasion :

1- de se prendre un week-end de 3 jours à la campagne avec 20°C au soleil de mi-octobre.
2- de côtoyer pendant 48 heures une cinquantaine d'auteurs, de tous âges, sexes et venant de toute la France.
3- de se trouver immergé dans un monde où on ne parle que SFFF, écriture, cinéma, séries TV, littérature...
4- d'avoir les trois premiers en un !

C'est pourtant ce que je viens de vivre, pas plus tard que le week-end dernier. 
Ce moment magique répond au nom de "Convention Cocyclics 2014".

 C'est ici, au domaine de Bois Gérard, que ça s'est passé.

Pour celles et ceux qui débarqueraient sur ce blog (bonjour à vous, soyez les bienvenus ! ) je suis inscrit sur le forum Cocyclics depuis un peu moins d'un an. Ce collectif d'auteurs et lecteurs d'aider les écrivaillons en herbe à développer leur talent, par un système d'entraide et d'échange. Lise Syven, une des fondatrices de Cocyclics, décrit ce système comme "une utopie qui marche". Ça non plus, ça ne se voit pas tous les jours.

Quand on est sur ce gigantesque forum, on y croise des centaines de pseudos. On échange, on apprend à s'y connaître, des affinités se créent. Alors, le jour où on a l'occasion de voir en vrai toutes ces personnes, c'est forcément un grand moment, inoubliable. On découvre également d'autres gens, moins présents sur le forum, ou avec lesquels on n'a pas encore eu le plaisir d'échanger. On chercher à le prolonger, en se couchant à des heures indues, au mépris de son quota de sommeil nécessaire. Ce qui n'empêche que le temps file trop vite, que la fin semble beaucoup trop proche du début.


Je ne vous raconterai pas ici le détail des activités de ce week-end, car oui, nous avons - un peu - travaillé quand même. C'est dans les pages du blog de Cocyclics, Tintamar(r)e, que vous lirez sous peu ce récapitulatif. Vous pouvez d'ailleurs vous y rendre de suite, et lire les captivants articles que l'équipe a déjà rédigé, ça se passe par ici.

Ce que je voulais simplement dire, c'est que j'ai adoré participer à ma première convention. C'était un moment hors du temps et de l'espace, à quelques milliers d'années lumière du quotidien. Une de ces expériences qui font croire à la magie, se dire qu'on aimerait que ce soit tous les jours comme ça. Le genre d'évènement qui remotive les auteurs, leur redonne confiance et énergie pour écrire davantage d'histoires.

On pourrait penser que c'est l'expérience d'une vie. Mais en ce qui me concerne, c'est l'expérience d'une année. Car l'an prochain, quoi qu'il arrive, j'y retourne !

Encore un énorme merci à toutes les grenouilles qui ont rendu cet évènement possible !


dimanche 12 octobre 2014

Bien écrire ne suffit pas.

C'est hélas une vérité avec laquelle les auteurs, surtout les amateurs peu connus, doivent composer.

J'ai récemment jeté un œil rapide à la liste des best-sellers actuels dans notre cher pays. 
Rien ne me surprit moins que d'y trouver "merci pour ce moment" de V. Trierweiler qui a défrayé la chronique. Je n'irai pas gaspiller mon argent à en faire l'acquisition, d'autant que le thème abordé par l'auteur ne suscite guère mon intérêt, mais j'ai pu en lire quelques extraits dans les inrock et autres publications.

Je n'irai pas jusqu'à dire que c'est bien écrit. C'est du français, grammaticalement et orthographiquement correct, mais c'est à peu près tout.

Ce qui n'empêche que l'ex première Dame a signé un premier tirage à 200.000 exemplaire (équivalent à ce que signerait Amélie Nothomb) et a déjà vendu je ne sais combien des milliers de son livre.



N'en déduisez toutefois pas que bien écrire est un obstacle au succès ! Déduisez-en plutôt que le succès d'un livre en librairie tient à plusieurs paramètres, mais essentiellement à son thème. 
C'est même cette notion de thème qui vous permettra, si vous êtes un illustre inconnu, de pousser la porte des maisons d'édition.

Même avec un style digne d'Alain Damasio, si vous racontez une histoire qui n'est pas susceptible de captiver les foules, vous obtiendrez un refus. Sans doute poli et argumenté, peut-être même élogieux quant à vos capacités à manier la langue de Molière, mais un refus quand même.

Or, nous autres auteurs aimons disserter de ce qui nous plait, sans tenir compte à aucun moment de ce genre de considération bassement matérielles et "marketing", comme ils disent. Vous savez, ces gens qui savent ce qui se vend ou ne se vend pas, qui font la pluie et le beau temps des rayonnages de la FNAC. 
Eux, ils savent.


Nous, soit on ne sait pas, soit on s'en contrefiche. Mais pour être honnête, la plupart du temps, on ne sait pas. 
Donc, si vous écrivez avec le même talent que Damasio, mais que vous racontez la rencontre inopinée d'une chaussette trouée et d'une parie de mitaines lors d'un matin d'hiver enneigé, il est assez peu probable qu'un éditeur vous déclare sa flamme. En revanche, si vous avez la chance d'être une ex première dame de France et d'avoir envie de régler vos comptes avec votre président d'ex compagnon, vous pouvez bien ne connaitre qu'une centaine de mots de la langue française, les éditeurs seront prêts à se tirer dessus pour vous faire signer un Bon À Tirer. (Je précise que V. Trierweiler semble connaître plus qu'une centaine de mots de notre langue, ceci n'est pas une attaque contre elle.)

Comment fait-on quand on écrit un roman pour s'assurer de sa qualité ? Dans un monde parfait, on l'envoie à des gens férus de lettre, des dévoreurs de romans, peut-être même des auteurs. Ils vont vous dire tout ce qu'il y à a dire sur votre style, vos arcs narratifs, la profondeur de vos personnages, la puissance de vos dialogues, la taille de vos chapitres, la fluidité de votre synopsis. Ils vont vous aider de manière considérable à parfaire votre roman.
Mais il est très peu probable qu'un d'eux vous dise, d'un ton gêné : "tu sais, ton histoire de chaussette et de mitaine, je ne sais pas bien qui aura envie d'acheter ça."
Probablement parce qu'ils ne pensent pas à cette dimension là. Peut-être même parce que votre chaussette trouée est si émouvante quand elle raconte sa vie aux pieds de ce vieil homme que ça leur a arraché une petite larme. 
N'empêche que l'éditeur, lui, aura un autre regard. Votre style lui importera moins que la possibilité de vendre votre roman. Il ne se verra probablement pas pondre un 4 de couv' disant "Le matin de la mort de Fernand, Ginette la chaussette et Germaine la mitaine, qui se sont tant et tant de fois côtoyées, peuvent enfin se parler. Débute alors une prodigieuse histoire d'amitié au coeur d'un hiver enneigé, tandis que les deux vieilles dames, déjà usées par le temps et les années, sont emmenées sans ménagement chez Emmaüs. Survivront-elles à cette nouvelle condition ?"



Ce qui est dommage, c'est que personne d'autre ne vous le dira. Vous le découvrirez à force de refus, polis et parfois même argumentés. Mais au bout du trentième, vous en viendrez quand même à considérer que ces éditeurs sont des gens bizarres, puisqu'ils encensent votre plume mais ne veulent pas de votre livre !

Je précise ici que je n'ai jamais été investi dans la bêta-lecture d'un roman que j'estime génial mais invendable. Mais il se pourrait que ça vous soit arrivé, à vous. Ou que cela vous arrive un jour.
Si c'est le cas, soyez gentils : expliquez à votre ami(e) auteur(e) que vous ne percevez pas tout à fait le potentiel commercial de son œuvre. Il ou elle en fera ce qu'il ou elle voudra, mais au moins, vous lui aurez peut-être évité une cruelle désillusion :)
En tout cas, c'est un service que j'aimerais qu'on me rende !


samedi 11 octobre 2014

Challenge Francofou : Fortune cookies par Silène Edgar



Ce nouvel article s'inscrit dans le cadre du challenge Francofou, qui me donne l'occasion de faire la promotion des romans de SFFF francophone qui m'ont plu. 
N'hésitez pas à vous rendre sur leur site pour en savoir plus.


Je vais donc vous parler aujourd'hui de Fortune Cookies, brillamment écrit par Silène Edgar.
Ma chérie l'avait lu avant moi, et elle avait beaucoup aimé. Elle n'est pas rentrée dans les détails, à ma demande d'ailleurs ;)


À mon tour je l'ai lu, et avec le recul, je peux affirmer que c'est un de mes coups de cœur de l'année. 
 Fortune cookies est un roman qui se laisse dévorer tout seul. En terme de format on est proche des petites friandises que nous offre Amélie Nothomb, mais en terme de contenu on est sur tout autre chose. 
J'ai adoré la façon dont Silène nous introduit ce personnage du quotidien, tout ce qu'il y a de simple et normal de prime abord et qui peu à peu va se révéler, se dévoiler et nous offrir ses trésors. C'est clairement Blanche qui porte le récit à bout de bras, et avec une déconcertante facilité. Elle nous embarque sur son petit radeau qui dérive sur l'océan de sa vie, apparemment calme. Jusqu'à ce que les éléments s'animent, que la tempête se mette à gronder et se rapproche. 
Là, par la magie de l'auteur, le petit radeau devient une arche, et on embarque à bord sans s'en apercevoir. Parce que Blanche, c'est un peu chacun de nous. Je ne suis pas mère de famille, je ne suis même pas une femme ! Mais je la comprend, je partage avec Blanche ce passé agité, rêveur et protestataire qui se mue en quotidien calme, anesthésié par la vie. Je me dis que je pourrais faire comme elle dans la même situation. Le récit prend aux tripes, avec un style fluide et d'une rare efficacité, composé de mots qui tombent justes au bon moment. On ne voit pas les pages défiler, on pourrait en lire le double, le triple... 



Et voilà cette fin. Cette fameuse fin que ma chérie m'a décrite comme "frustrante". Assurément, oui, elle l'est. Mais en même temps, c'est la fin qu'il fallait pour un roman comme celui-ci, je pense que je n'aurais pas accepté d'en lire une autre. 
Enfin, la trame narrative est superbement bien trouvée. On oscille entre le monde "d'avant" et le monde "d'après" en permanence, et peu à peu on recolle les morceaux. Diablement efficace !
Le gros plus de ce roman, c'est que Silène crée ainsi une réalité alternative qu'il serait tout à fait possible de réutiliser. Quand j'ai eu fini ma lecture, j'avais plein de questions dans la tête sur ce qui s'est passé, pourquoi, comment, toutes ces zones d'ombre qui restent dans les profondeurs des ténèbres, tout simplement parce que Blanche n'arrive pas à les percer. Du coup j'espère bien que Silène Edgar a prévu de réutiliser cet excellent univers, effrayant car crédible.

Juste un détail (ATTENTION SPOILER !) :
l'histoire du cours du pétrole qui grimpe en deux jours à 2000 dollars le baril. Il se trouve que je suis les marchés depuis pas mal d'années, je me suis amusé à analyser les krach boursiers, leurs causes, leurs conséquences et leurs différents visages. Un cours qui se multiplierait par 20 en 2 jours me semble tout bonnement surréaliste. Qu'il double en deux jours, et que dans le même temps l'Euro s'effondre, accentuant la montée du prix à la pompe, ça oui je peux le concevoir. Disons que le prix se trouverait alors multiplié par 4, grand maximum. Après, les choses peuvent continuer à empirer, cela va sans dire. Cela dit, c'est accessoire, ça fait partie d'un ensemble d'événements qui, pour le coup, sont parfaitement crédibles, donc pas de souci majeur.

En bref : à lire d'urgence !

Silène est également auteure d'une trilogie d'anticipation post-apocalyptique pour la jeunesse : La trilogie de Moana. Le premier volume, La Saveur des figues, paraît en 2010, puis Le Bateau vagabond, en octobre 2011 et À la source des nuages, paru en novembre 2013.


Elle est aussi co-auteur avec Paul Beorn de 14-14, roman jeunesse qui a reçu le prix Gulli 2014.
Dernièrement, Silène a sorti Féélures, un texte burlesque sur les fées de Brocéliande, avec quelques considérations politiques, philosophiques et psychologiques qui se mêlent aux jeux de mots les plus féelés qu'elle a pu trouver.


jeudi 9 octobre 2014

Challenge Francofou : Les Derniers Parfaits (Paul Beorn)



Celles et ceux qui suivent ce blog régulièrement commencent à le savoir : je soutiens autant que je le peux la diffusion et la reconnaissance de la SFFF francophone. Je pourrai vous citer des dizaines de raisons pour ça, mais je ne vous en donnerai qu'une : parce qu'elle le vaut bien !
Le challenge Francofou s'inscrit dans cette optique : parler de livres de SFFF francophone et donner envie à d'autres de les lire. N'hésitez pas à vous rendre sur leur site pour en savoir plus.

Je vais profiter de cette initiative pour vous parler d'un roman que j'ai beacuoup aimé et qui m'a mis une bonne petite claque : Les Derniers Parfaits de Paul Beorn.




Quatrième de couverture :
Dans le royaume de France ravagé par la guerre contre les légions catharis d’Occitania, Cristo, un soldat prisonnier, échappe à ses geôliers enchaîné à trois compagnons d’infortune. Les quatre fuyards que tout oppose doivent s'entraider pour survivre, contraints de se cacher puis d'emprunter les chemins de traverse. Commence alors pour eux une haletante course-poursuite à travers un pays ennemi dominé par des démons et vivant sous le joug d’une Église catharis fanatisée. Ici, dans les vestiges d'un antique Empire disparu, une magie ancienne continue de survivre dans des talismans et d'immenses tours-statues. Au coeur des forêts profondes et des montagnes déchiquetées des terres occitanes, pris dans le fracas des combats, Cristo et ses compagnons prendront conscience de porter en eux un pouvoir insoupçonné. Ils verront leur destin basculer et le monde trembler sous leurs pas.



Au début, j'étais surtout intrigué par le titre de l'oeuvre. Je ne parvenais pas du tout à comprendre à quoi il renvoyait, ce qui pouvait se cacher derrière. Alors, je me suis décidé à le lire, intrigué.
Très vite, je me suis laissé happer par l'histoire. Contrairement à ce que prétend le 4ème de couverture, Cristo n'est pas soldat. Mais je ne peux pas vous en dire beaucoup plus, car un des grands intérêts de ce roman réside dans la découverte, pas à pas, de ses protagonistes. Tous quatre sont attachés par une chaîne que rien ne semble pouvoir détruire. Ils sont donc obligés de faire front commun pour trouver une solution à leur problème, malgré leurs différences et parfois leurs divergences d'opinion. 

L'histoire démarre de manière originale et nous entraîne, petit à petit, dans la découverte d'un monde riche et complexe, mais facile à assimiler pour le lecteur. Beorn a choisi un cadre uchronique, dans lequel il a incorporé de nombreux éléments. En particulier la magie ! 
Sans entrer dans les détails, toujours pour ne pas vous gâcher la découverte, celle-ci est très présente sans jamais être étouffante. Il y a plusieurs sortes de magie, qui sont utilisées au fil du roman avec une grande finesse. On enchaîne les découvertes, les révélations, et très vite, on est emporté par le roman, son souffle épique, l'aventure qui s'échappe des pages pour s'installer devant notre Troisième Oeil, celui du lecteur qui visualise le décor que l'auteur a planté.

La montée en tension est progressive, l'univers s'étoffe et nos quatre personnages se révèlent, riches et fouillés. L'épisode des "maisons de jeunesse" est un des moments les plus forts du roman. Beorn sait nous les décrire de l'extérieur comme de l'intérieur et ce qui s'y passe ne pourra pas vous laisser insensible.

Je pourrai vous parler de ce roman pendant longtemps, mais je finirai par en dire trop. Il vaut mieux vous dire que c'est un pur roman de fantasy, très bien écrit, dans lequel on se plonge avec plaisir et dont on ressort avec des images et des souvenirs pleins la tête. Le climat est parfois sombre, mais il y a toujours une lueur d'espoir.
Et mention spéciale pour un lacet et un lionceau.

Dernier détail : quand j'ai lu ce roman, il n'existait que dans son édition initiale, grand format... Avec une police de caractère bien trop petite ! 
Depuis, et fort heureusement, Les Derniers Parfaits est sorti chez Helios, la collection "poche" de Mnémos. La police y est un peu plus grande et espacée, ce qui rend la lecture bien plus agréable. Enfin, cet excellent roman existe également en numérique, ce qui résout définitivement le problème de la taille de la police. 



Paul Beorn est également auteur d'autres romans, comme le dyptique "La pucelle de Diable Vert", "14-14", un très bon roman jeunesse coécrit avec Silène Edgar, et dernièrement "Le club des chasseurs de fantômes", également un roman jeunesse en attendant son prochain livre, qui se destinera à nouveau a un public adulte.